Un ami, éminent consultant en organisation, m’évoquait il y a quelques jours les compétences nécessaires à un manager pour accompagner avec efficience le changement.
Parmi les points qu’il soulevait, il insistait sur la nécessaire présence de « l’empathie » dans le champ des aptitudes du profil amené à piloter la transformation d’un système. Il lui semblait indispensable que ce genre de mission soit orchestrée par un individu ayant la faculté à se mettre à la place d’autrui et de percevoir ce qu’il ressent.
Sur le fond je trouvais son analyse pertinente (voire évidente et limpide). J’ai souhaité cependant éclaircir la terminologie employée… De quoi parlait-t-on ? D’une compétence que l’on peut acquérir ? D’une aptitude, qualité innée.
Pourquoi cette question de l’empathie revêt-elle à mes yeux une telle importance ?
Si je recrute un directeur de production amené à accompagner une équipe dans la transformation des modes opératoires de son atelier (défi actuel à relever notamment dans le métier des Arts Graphiques), devrais-je ajouter à mes critères de recrutement la recherche de cette qualité ou puis-je imaginer faire l’impasse sur cet item en projetant de former ma recrue au développement de son empathie ?
Nous nous sommes séparés sur deux points de vue divergents ; lui, persuadé qu’en envoyant mon candidat en stage, nous comblerions le manque, moi, arque boutée sur ma conviction : « l’empathie ne s’apprend pas », à l’opposé de ce trait se trouvent les sociopathes, et personne ne peut modifier la nature humaine.
Si vous me lisez régulièrement, vous vous doutez bien que je n’allais pas en rester là. J’ai donc compulsé mes livres de psycho, les écrits pléthoriques sur le sujet, d’Elle magazine à d’obscurs essais et j’ai trouvé : nous détenions tous les deux une part de la vérité.
Premier constat qui m’interpelle, les observateurs signalent que la population actuelle est environ 50% moins empathique qu’il y a 20 ans. Société individualiste, moins d’ouverture d’esprit, plus de repli sur soi, moins de communication… Qui l’aurait imaginé à l’heure où tout le monde parle de tout et n’importe quoi avec tout le monde et où le mot « bienveillance » tapisse la toile jusqu’à l’écœurement ?
Reprenons …
On distingue deux « empathies ».
L’empathie cognitive : elle s’appuie sur l’analyse du comportement d’un individu grâce à l’interprétation de plusieurs facteurs ; ses gestes, le ton de sa voix, les mots employés… de l’utilisation d’innombrables outils très pertinents comme la Process Com, Persona… et des expériences que vous avez vécues, emmagasinées comme une bibliothèque d’émotions que votre cerveau a appris à décoder. Nous sommes en présence d’un savoir qui a été acquis, et que l’on peut enrichir par l’apprentissage de nouvelles grilles de lectures ou techniques d’analyses comportementales.
L’empathie émotionnelle, quant à elle, se construit dès le plus jeune âge. Son mécanisme est dit « reflexif » (sans pensée) ? Savez-vous par exemple que si vous êtes témoin de la souffrance d’autrui, vos comportements « agressifs » sont inconsciemment inhibés. Une voiture vous heurte, vous sortez furieux de votre véhicule et vous constatez que le conducteur incriminé est blessé et saigne ; votre agressivité s’estompe.
Cette capacité à partager la souffrance de l’autre s’acquiert dès l’enfance. C’est ainsi que j’ai découvert que dans de nombreux pays nordiques, les écoliers de maternelle se voient proposer des cours d’empathie une fois par semaine….
Alors me direz-vous, comment travailler cette qualité et ne pas sombrer dans l’égocentrisme ambiant ?
Je vous laisserai découvrir les nombreux ouvrages forts bien écrits sur l’écoute, la découverte d’autrui, l’intelligence collective, l’intérêt de la diversité… la curiosité sur l’autre aiguisée, votre talent à comprendre les sentiments et les émotions de vos congénères se développera…
Mais avant toute chose (et ça je ne l’ai pas beaucoup lu), apprenez à décoder vos propres émotions, à les accueillir, à vous comprendre, à vous aimer…. Alors, et alors seulement, se posera sur votre vie la magie de l’interaction émotionnelle ; cadeau de cette merveilleuse qualité « l’empathie ».
Elvire Daudigny del Fondo
Administrateure Xplor France
Audigny Consulting