La crise sanitaire nous a donné cette occasion unique d’entrer dans un territoire lexical inconnu. Le registre médical l’a emporté haut la main. Mais des mots de vocabulaire administratif, militaire ou même carcéral ont (re)fleuri.

Confinement

Le confinement est adopté, comme anciennement pour un prisonnier ou une religieuse, mais que dire de la « distanciation sociale » ? Ridicule, celui-là ! Sans doute, un des seuls bénéfices du COVID aura été, en nous contraignant à la distance physique, de nous pousser à renforcer les relations sociales sous d’autres modes.

Mesures barrières

Sans parler des mesures barrières ! Effectivement, des mesures de protection sanitaire ou d’hygiène sont devenues instantanément des barbelés à dresser entre les individus. Sans s’arrêter au sens des mots, on peut s’interroger sur l’empreinte que peut laisser ce type d’expression.

Nous sommes en guerre et la mobilisation est générale. Mais ne serait-il pas mieux de garder les métaphores guerrières pour le terrorisme, la diplomatie secrète ou le grand banditisme et les trafiquants divers ?

Comorbidité

La comorbidité ! Celui-ci est une perle. Il est effectivement essentiel de bien soigner les patients atteints du COVID et faisant état de comorbidités. De même, devons-nous vacciner les patients présentant des facteurs de risque, afin d’éviter les situations de comorbidité. Mais la comorbidité à la pelle, non. Qu’il est laid, ce mot-là !

Distanciel

Le présentiel et le « distanciel ». Le premier existe, mais pas son récent camarade. Venu de l’enseignement, le premier nous rappelle que notre supérieur hiérarchique veut nous voir au bureau. Mais travaillent-ils donc quand ils sont à distance ? Le « distanciel », étrangement écrit avec un « c » (du latin distantia), porte un triste héritage. Effectivement, il exprime la distance physique mais également la prise de distance que l’emploi historique lui a associée. Et c’est bien là un des avatars du télétravail, n’est-ce pas ?

Stop ou encore ?

Arrêtons-nous là ! Nous nous sommes bien compris. S’attacher au choix des mots évite des phénomènes de représentation suscitant des réactions diverses parmi leur audience et, surtout, apporte du crédit à leurs émetteurs. Le fait de décrire une situation avec des mots justes, d’en tirer des conclusions, recommandations ou décisions précises, contribue à la maîtrise de ladite situation. A bon entendeur !


Benoît Charon
Entrepreneur
Président Xplor France